2. Les fumées

Fumées dans "La Planète des Singes" de Franklin J. Schaffner sorti en 1969
Fumées dans "La Planète des Singes" de Franklin J. Schaffner sorti en 1969

Un autre effet très utilisé dans les films pour simuler des incendies ou simplement pour donner une intention dramatique à une scène est l'effet de fumée. Il existe plusieurs types de fumées et plusieurs façons de les recréer.

 

La technique pour créer de la fumée la plus largement utilisée dans les films, au théâtre ou même lors de spectacles est l'utilisation de machines à fumées.

Du liquide à fumée est pompé dans une chambre chauffante où il se transforme en vapeur. Celle-ci est ensuite expulsée à travers un bec plus ou moins fin en fonction de l'effet voulu. Il n'est cependant généralement pas nécessaire d'expulser la fumée, la pression créée par sa vaporisation à l'intérieur de la machine étant suffisante. Le liquide à fumée est composé d'eau mélangée à des glycols ou de la glycérine.

Ces molécules permettent de créer une fumée assez épaisse mais également persistante. L'utilisation d'eau seule ne donnerait qu'une fine fumée éphémère, la vapeur n'étant quasiment pas visible à l’œil nu. Il est cependant possible de créer des fumées fines et persistantes en utilisant des liquides à fumée faits à base d'huiles minérales, on appelle ces fumées "brouillards". Elles sont utilisées pour faire ressortir des faisceaux lumineux lors de spectacles par exemple. Les huiles minérales sont obtenues par distillation, technique consistant à séparer des liquides dont les températures d'ébullition sont différentes, de combustibles fossiles comme le pétrole.

Les machines à fumée ne permettent pas de faire de la fumée colorée, le liquide à fumée peut être coloré mais la couleur ne sera quasiment pas visible une fois le gaz expulsé. Ces machines sont largement utilisées dans La Planète des singes, pour recréer des fumées plus ou moins denses et plus ou moins hautes.

Nous voyons sur l'image de La Planète des Singes ci-dessus de la fumée très fine, une machine à fumée est sûrement cachée dans le décor. Il est ainsi visible que les effets les plus impressionnants ne sont pas forcément les fumées les plus épaisses.

« Et ça c’est une petite machine, hein. Elle a cette capacité-là : elle va de ce débit-là jusqu’à celui-là en fait. (…) Tout dépend, tout dépend ce qu’on fait. Pour un défilé ou quelque chose en décor. (…) En général, comme tout est réglé à la console lumière, c’est celui qui voit le show qui règle selon ce qu’il a besoin. (…) Donc forcément, quand on a une machine qui fait 2,6kg, ça veut dire que c’est 4 fois cette puissance-là. Et la 9kg je ne vous en parle même pas ! »

Nous avons eu la chance de pouvoir visiter les locaux de C17, une entreprise française spécialisée dans la location et la vente de machines (à fumée, à flammes...) pour effets spéciaux dans les arts du spectacle vivant.

Nous y avons filmé le fonctionnement d'une petite machine à fumée, et nous avons pu également voir bien plus d'effets spéciaux, de machines...


« Ça c’est la puissance de la pompe. C’est-à-dire que quand elle sera chaude, ça envoie la puissance maximale de la machine. Après on peut effectivement mettre ce que l’on veut. Après il y a des prises, justement, qui nous permettent de nous raccorder sur une console de lumière ou nos consoles à nous : on a un système d’adresse, là par exemple c’est le 003, le canal 003, donc ça veut dire que quand on envoie le canal 003 on l’a. Quand on l’envoie plus ou moins, on a plus ou moins de fumée. »


Fumée fine au sol dans "La Planète des Singes" de Tim Burton sorti en 2001
Fumée fine au sol dans "La Planète des Singes" de Tim Burton sorti en 2001

Outre les fumées hautes, il est également possible de créer des fumées dites "au sol". Pour cela un moyen très simple est d'utiliser une machine à fumée simple mais de refroidir la fumée à sa sortie en utilisant du dioxyde de carbone liquide à -55°C. Ce dioxyde de carbone est souvent récupéré dans des usines où il est rejeté, et donc recyclé. La fumée ainsi refroidie devient plus lourde, car se rapprochant de son état liquide, et descend au sol. On peut également directement réchauffer du dioxyde de carbone à l'état solide (de la carboglace) en le plongeant dans de l'eau, le dioxyde de carbone deviendra alors une fumée par sublimation. La sublimation est le passage d'un élément de l'état solide directement à l'état gazeux. En effet, le CO2 n'est jamais liquide dans des conditions de pression normales  

(1 bar soit 10^5 Pa). Plus l'eau dans laquelle la carboglace est plongée est chaude plus la fumée produite sera épaisse car la sublimation aura eu lieu rapidement. L'image de La Planète des Singes montre de la fumée très fine qui reste au sol car elle est assez lourde.

 

Les différents états du dioxyde de carbone
Les différents états du dioxyde de carbone

Nous avons également réalisé un TP pendant lequel nous avons créé des fumigènes :

 

COMPTE-RENDU TP n°1 : Création d’un fumigène 9/10/15

 

Problématique : Comment créer un fumigène ? Qu’est-ce qui différencie un fumigène d’une fumée basique de spectacle ?

Méthode : Nous allons mener trois expériences différentes au cours de ce TP, par précaution (si l’une ne fonctionne pas, l’autre peut-être). Nous allons tester tout d’abord la poudre à canon, qui n’est pas à proprement dit un fumigène. Puis nous allons par la suite nous atteler aux deux protocoles de fumigène (qui n’ont que très peu de différences) d’une certaine manière : d’abord tester sans chauffer notre mélange, en petite quantité. Après cela, on pourra passer à de plus grandes quantités et chauffer notre mélange.

On sait que le mélange du sucre et du nitrate de potassium crée un produit inflammable et donc de fortes volutes de fumée.

 

  1. Poudre à canon/ Poudre Noire

Réaction chimique :

Le nitrate de potassium solide, la poudre de charbon et la poudre de soufre constituent un mélange détonant appelé la poudre noire (ou poudre à canon). A chaud, ils réagissent ensemble pour former un résidu solide de sulfure de potassium, de diazote gazeux et du CO2.

 

Nom de l'ion

nitrate

potassium

sulfure

Formule de l'ion

NO3-

K+

S2-

 

Nom du solide

Nitrate de potassium

Sulfure de potassium

Formule du solide

KNO3

K2S

 

Équation chimique de la réaction: 2 KNO3 + S ----→ K2S + N2 + 3 CO2

Données : M(C)= 12,0 g.mol-1 ; M(C)= 14,0 g.mol-1 ; M(O)= 16,0 g.mol-1 ; M(S)= 32,1 g.mol-1 ; M(K)= 39,1 g.mol-1

n(KNO3)= 1,6*10^-2*2= 3,2*10^-2 mol

n(C)= 1,6*10^-2*3= 4,8*10^-2 mol

On va prendre mS= 0,5g n(S)= m(S)/M(S)= 0,5/32,1= 1,6*10^-2 mol

M(KNO3)=1M(K)+1M(N)+3M(O) =1*39,1+1*14,0+3*16,0=101,1g.mol

m(KNO3)=M(KNO3)*n(KNO3)=101,1*3,2*10^-2=3,2g

m(C)=M(C)*n(C)=12,0*4,8*10^-2=0,6g

m(S)=M(S)*n(S)=32,1*1,6*10^-2=0,5g

Nous avons donc les quantités nécessaires à utiliser pour réaliser cette expérience

 

 

  1. Fumigènes

Sécurité : Se munir de sa blouse et de lunettes de protection. Tous les allumages se font en extérieur.

Matériel :

-Nitrate de Potassium (salpêtre=KNO3)

-Sucre

-Bicarbonate de soude

-Casserole

-Carton d’emballage

-Rouleau de papier toilette en carton

-Feuille d’aluminium

-Mèche/morceau de ficelle

-Balance

-Mortier

-Récipient

-Éthanol (carburant) et bécher

-Chauffage

 

 

 

 

Protocole 1 :

 

  • Mixer deux composants : le nitrate de potassium et le sucre.

  • Préparer un emballage doublé d’une feuille d’aluminium

  • Prendre la casserole

  • Mettre à chauffer sur feux doux. Remuer constamment jusqu’à complète fusion des éléments. La mixture doit être de couleur marron/noire à cause de la présence du sucre. ATTENTION cela ne doit pas fumer.

  • Ajouter une cuillère de bicarbonate de soude

  • Verser le mélange dans le carton d’emballage

  • Insérer la mèche préalablement trempée dans l’éthanol quand le mélange est encore mou

  • Placer le fumigène dans un endroit sûr à l’extérieur, allumer la mèche et s’éloigner

 

 

Protocole 2 :

 

  • Moudre le nitrate de potassium et le sucre à l’aide d’un mortier pour obtenir des poudres bien fines. Moudre séparément les deux composants. ATTENTION il ne faut aucune étincelle à proximité.

  • Mélanger 3 parts de salpêtre pour 2 de sucre dans un récipient

  • Sceller le rouleau de papier toilette à l’une de ses ouvertures et verser ce mélange dans le tube.

  • Insérer une mèche d’une dizaines de centimètres préalablement trempée dans l’éthanol


 

Expériences menées :

  • Poudre à Canon.

La flamme est dégagée complètement. Expérience validée.

  • Protocole 1 sans emballage carton avec chauffage.

Mixture de nitrate de potassium et de sucre trop cuite mais dégagement d’une faible fumée après allumage.

  • Protocole 2 non chauffé (donc sous forme de poudre) sans emballage et sans mèche.

Petite dose de fumée dégagée avec grande rapidité.

  • Idem que point ci-dessus avec une mèche.

Petite dose de fumée dégagée plus lentement.

  • Protocole 1 (chauffé) avec carton d’emballage doublé d’aluminium avec mèche. 9 cuillérées de nitrate de potassium et 6 cuillérées de sucre.

Grosse fumée blanche dégagée de manière assez éparse et qui reste dans l’air avant de se dissiper. Expérience validée.

  • Idem que point ci-dessus en doublant les proportions et en utilisant le rouleau de papier toilette comme emballage (toujours doublé d’aluminium) : 18 cuillérées de nitrate de potassium et 12 cuillérées de sucre.

Très grosse fumée blanche dégagée qui monte haut vers le ciel grâce à la forme cylindrique du rouleau en carton qui permet à la fumée d’être plus concentrée et de se déplacer vers une unique direction. C’est le fumigène qui dure le plus longtemps de toutes ces expériences. On en déduit que plus la quantité de mixture est grande, plus la fumée dure longtemps. Fumée qui reste dans l’air avant de se dissiper. Expérience validée


Expériences validées et réussies !

Sources:

http://makingvideo.free.fr/pdf/fumeeflammeexplosion.pdf

http://www.c17sfx.com/

http://www.pyrofolies.com/achat/index.php

http://fr.wikihow.com/fabriquer-un-fumig%C3%A8ne